De notre correspondant local à Port-au-PrinceDepuis trois jours, nous sommes sous le cyclone Sandy qui a déjà fait beaucoup de dégâts. Il a apporté beaucoup de pluie et de vent sur tous les départements du Sud d’Haïti.
Toutes les écoles du pays sont officiellement fermées depuis mercredi soir, ainsi que l’administration et les commerces.
Dans la nuit de mercredi à jeudi, la pluie a commencé à tomber et a redoublé en cours de matinée. Au matin, l’école de Fourgy nous a fait savoir que les eaux avaient envahi l’école et les maisons de tout le quartier. Vers 10h, avec la pluie qui redoublait, les eaux ont considérablement monté, envahissant tout et noyant beaucoup de maisons ainsi que l’école de Fourgy. Nous nous sommes rendus sur les lieux en passant par le Nord pour éviter les inondations à côté de la rivière Grise en crue, la route de Marin étant impraticable.
Avant d’arriver à l’école, nous avons dû traverser une portion de route dangereuse car toutes les eaux de la zone déferlaient par dessus de la route avec force pour aller de l’autre côté et rejoindre la mer. L’école était complètement sous l’eau, près d’un mètre et demi, alors que les eaux n’étaient pas encore à leur plus haut niveau Les gardiens ont ouvert le portail à notre demande (la route surplombe les terrains, ce qui crée d’ailleurs un rempart que les eaux cherchent à traverser). L’eau leur arrivait au torse, toute la cour était sous l’eau, on pouvait voir deux chaises de préscolaire qui venaient d’être livrées flotter dans l’eau. Tous les gens étaient dans la rue, l’eau atteignait encore une cinquantaine de centimètres sur la route de Marin. Nous nous sommes rendus à pied vers le pont surplombant la rivière Grise. Les eaux étaient en furie, atteignant pratiquement le pont.
Les pluies ont continué de plus belle toute la nuit et n’ont pas encore cessé ce vendredi. Jusqu’à présent, la pluie tombe sans interruption. Les eaux ont monté encore plus haut à Fourgy et dans l’école. Beaucoup de gens ont tout perdu sous les eaux et ont dû évacuer leurs maisons pour se réfugier où ils pouvaient, dans d'autres quartiers pour certains, en province pour un très grand nombre qui n'avaient de toute manière pas retrouvé de logement décent depuis le séisme et ont préféré quitter définitivement le bidonville.
De tous côtés, les nouvelles tombent sur les radios. Partout c’est la désolation, les députés ou maires décrivent des situations réellement catastrophiques. La mer est déchaînée, plus d’une dizaine de pertes en vie humaine, de nombreux dégâts matériels, maisons emportées, ponts détruits, rivières en crue, plantations détruites, perte de bétails très importante, de nombreuses inondations, sinistrés, déplacés, des villages ou régions complètement isolés. Officiellement, 16 morts sont dénombrés mais dans de nombreuses communes, il est fait part de personnes décédées ou disparues.
Aujourd’hui vendredi, le cyclone Sandy est au large de la Floride mais son rayon d’action est très large car, même dans les côtes sud, la mer reste déchaînée avec beaucoup de vent et de pluie. Tous les départements restent en vigilance rouge. Le choléra fait à nouveau parler de lui et une recrudescence des cas est attendue.
Cela va créer une véritable crise alimentaire déjà amorcée avec la tempête Isaac fin août. Ce qui restait comme plantations et bétail après la tempête Isaac sont ravagés, la route de Malpasse, frontière avec la république dominicaine, est fermée à cause d’un pont écroulé. De nombreuses denrées alimentaires proviennent de la frontière est et ne peuvent plus parvenir à Port-au-Prince. C’est une catastrophe car les prix des denrées alimentaires avaient déjà augmenté avant ce cyclone de 30 jusqu’à 50 %.
C’est une situation assez imprévisible car ce cyclone s’est créé dans la mer Caraïbes puis est remonté vers le nord, une situation rare, les cyclones se formant habituellement dans l’océan Atlantique et traversant les îles de la Caraïbe.
Nous espérons pouvoir très vite faire un bilan des pertes et dommages matériels au sein de notre école. Les familles de nos élèves vont se trouver dans des situations individuelles encore plus extrêmes. On parle ici d’aide humanitaire mais elle ne pourra pas atteindre tous nos élèves et leur famille.
Aidez-nous !
Denis Puthiot
Port-au-Prince, le 27 octobre 2012